Le Trièves

« J’aime particulièrement le Trièves. Cette plaine tourmentée qui s’étend en triangle sous l’Obiou et le Grand Ferrand. Je suis à pied d’œuvre pour mes marches dans la montagne. Et puis j’aime la vie avec ces paysans âpres et doux. »

Jean Giono, Lalley, juillet 1935

Situation

Géologie

Patrimoine

    Les paysages

    L’histoire

    La population du Trièves aujourd’hui 

    L’architecture dans le Trièves

    Importance des axes de communication

    L’art culinaire

    Les « stars » du Trièves

Que sera le Trièves de demain ?

Bibliographie

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A. Situation

Le Trièves se trouve au sud du département de l'Isère. C'est un cirque immense entouré de montagnes et de forêts. Cette « campagne à la montagne » est délimitée à l’ouest (et sud ouest) par le massif Vercors, au sud est par le massif du Dévoluy et à l’est par la rivière du Drac.

carte


A l’Ouest dans le massif du Vercors, le Grand Veymont (2341 m), la Grande Moucherolle (2284 m) et le majestueux Mont Aiguille (2086 m) constituent les points culminants. Le col de Menée (1457 m) permet d’accéder au département de la Drome en direction de Die.

Au Sud-Est, la chaîne du Dévoluy est composée de l’Aiguille (2037 m), du Grand Ferrand (2758 m), de l’Obiou (2790 m) et se termine au niveau de Cordéac avec le Châtel (1937 m). Le col de la Croix-Haute (1176 m) est la frontière avec le département des Hautes Alpes 

Le Nord-est est bordé par les contreforts du massif des Ecrins et le Drac avec les lacs du Sautet et de Monteynard.

La nationale numéro 75 qui rejoint Sisteron longe le massif du Vercors avec au départ, Monestier de Clermont, Clelle, Lalley, et enfin le col de Lus.

Trièves signifie trois voies, celle qui relie le col de Fau à Mens (D34), celle de Lalley à Mens (D86) et cele de la Mure à Mens (D526). L’historique de ces voies de communication seront décrites plus en détail.

Souvent aujourd’hui encore, les frontières du Trièves font la réputation de ce pays. Les touristes sont attirés par le lac de Monteynard réputé pour son vent thermique. Les amoureux de la nature portent leurs préférences sur la réserve des hauts plateaux du Vercors et les plus montagnards vers les difficultés techniques des massifs du Dévoluy… Mais le Trièves a un cœur plus paisible à découvrir.


B. Géologie

Il est assez difficile de présenter la géologie du Trièves. En effet, nous ne parlons pas ici d’un massif précis mais d’un immense bassin sculpté par le glacier du Drac ceinturé à l’est par la muraille du Dévoluy et à l’ouest par les hautes falaises du Vercors. Sa géologie sera très variable et complexe entre l’Urgonien du massif sub-alpin Vercors et les massifs cristallins alpins. Mais ce qui caractérise peut-être le Trièves c’est sa prédominance de marnes profondément échancré par le Drac et L’Ebron.

L’excellence du site internet geol-alp est incontournable pour celui qui veut approfondir ses connaissances en géologie. Je regrette néanmoins la complexité des termes employés qui si elle est justement motivée par soucis scientifique en fait un outil pédagogique difficilement exploitable pour un accompagnateur.

Je ne résiste pas cependant à joindre ici un lien de la présentation du Trièves

«Extrait de "GEOL-ALP" (http://www.geol-alp.com), par Maurice GIDON, 1998-2004»


Mais pour mieux comprendre ces schémas et termes scientifiques essayons de reconstituer cette géologie dans sa chronologie.

Chronologie

De plus je joins la chronologie plus spécifique au Vercors, mais qui à l’intérêt d’être allégé.

Chronologie Vercors


Voilà, sur ce socle scientifique un peu lourd, je vais maintenant tenter de raconter l’histoire géologique du Trièves.

Pour bien comprendre partons du postulat de bon sens qu’en géologie, les couches s’empilent chronologiquement les unes sur les autres. A contrario, l’érosion, au fil du temps rappelle à la surface des couches de plus en plus anciennes.


Voici un petit essai de schéma simplifié du Trièves réclamant votre plus grande indulgence.


coupe

En fait, toute ces roches se sont créées dans une période assez courte de l’histoire de la terre entre 100 et 200 Millions d’années. Elles remontent toutes à l’aire du secondaire.

            A cette époque la pangée devenue une grande plaine désertique (à la suite de l’érosion des massifs hercyniens et calédoniens) ouverte à une mer peu profonde se sépare en deux puis quatre continents, formant ainsi une mer profonde : l’océan alpin.

Si nous reprenons mon schéma en le lisant de gauche à droite, nous ne sommes plus étonné de trouver de nombreux fossiles dans notre fameux calcaire Urgonien du Vercors. Ces traces animales nous précisent qu’il s’agit d’une roche sédimentaire formé en eau profonde à l’époque de l’océan Alpin. Nous sommes à la fin du secondaire vers 110 M d’années.

Ensuite nous trouvons le Néocomien plus ancien de quelques dixièmes de M d’années. Ce mélange friable composée d’argile et de calcaire s’est bien érodé expliquant les falaises du Vercors et aussi le détachement du mont aiguille. Ensuite, une couche de calcaire tithonique a mieux résisté à l’érosion et nous laisse quelques montagnes intermédiaires comme le Serpaton par exemple. Nous voilà remonté dans le temps à quelques 130 M d’années.

Nous trouverons enfin formant le plateau du Trièves un ensemble de Marnes et Shistes mélange de roches calcaréo-argileuses datant la encore de quelques 10ènes de Millions d’années plus tôt, toujours dans le secondaire.

Les shistes sont ici seulement de composition identique aux marnes, mais disposés en feuillet sous l’effet de la pression à la limite du métamorphisme. 

photo shistes

sur la route de Roissard à Mens

Bien sûr, je ne parle ici que de l’âge de la roche. Le paysage s’explique par des phénomènes beaucoup plus récents que sont les périodes de glaciation. 

Une profonde empreinte est laissée par les glaciers du quaternaire. Le trièves devait présenter une surface plus lisse à l’époque. En effet, pendant la période du Riss, soit il y a 130 à        200.000 ans, le Trièves aurait été totalement noyé par les glaces provenant du glacier de l’Isère. 

En revanche, lors de la dernière période glaciaire (le Würm), la glace n’a pas dépassé vers le sud le village de St Paul les Monestier. Le Drac est alors bloqué par le glacier de l’Isère. Le Trièves est donc un gigantesque lac d’obturation. L’ homo sapiens existe déjà à cette époque et le lac de Monteynard semble plus étroit à l’homo sapiens sapiens d’aujourd’hui quand il tire des bord en planche à voile ou en kite… Mais je m’égare. 

A partir de 35 000 ans le glacier se retire, le lac se vidange et les rivières creusent rapidement leur sillon. 

Cette histoire explique les traits principaux du paysage. Les larges surfaces planes correspondent au fond ou aux rives de l’ancien lac. L’Ebron et le Drac ont saignés le paysage par des gorges profondes (300m au niveau du Monteynard).

Cet essai d’explication n’est pas toujours très clair et n’explique pas tout. De nombreuses exceptions jalonnent le Trièves comme des blocs erratiques d’origine cristalline par exemple.

Je conclurai ce chapitre en affirmant que la géologie n’est pas une science simple et qu’en tant qu’accompagnateur j’accompagnerai (justement) toujours mes propos de géologie d’une grande prudence et modestie…

C. Patrimoine


Les paysages


En grande partie façonnés par le travail des hommes, les paysages du Trièves témoignent de l’intelligence des rapports qu’ont entretenus les communautés avec leur territoire. L’activité humaine, extrêmement présente s’est totalement adaptée au relief, laissant par exemple les forêts occuper les terrains trop pentus et parfois instables. Aujourd’hui encore, ce sont les champs cultivés, les prés et les forêts qui composent l’essentiel de ce paysage où l’homme a inscrit sa marque sans le dénaturer. Une haie, un bosquet, une route en balcon, un chemin, un pont, un grange, une ferme, un village (, une autoroute ?)… autant d’éléments constitutifs d’un patrimoine quotidien qui illustre aujourd’hui encore cette définition que l’on peut donner du Trièves : une campagne tranquille et habitée, à la montagne.


L’histoire


Pays de charmes et de contrastes, passage clé entre le nord et le sud, le Trièves a depuis toujours séduit les hommes qui s’y installèrent. Ce cycle se perpétue ainsi depuis des siècles jusqu’à aujourd’hui.

Les traces de l’homme préhistorique ne sont pas très nombreuses, non pas qu’il ne fréquentait peu la région, mais plus que les recherches scientifiques sont relativement peu nombreuses dans la région. J’en veux pour dire que les fouilles préalables au chantier de l’A51 nous démontrent que si on cherche, on trouve…

On trouve les premières traces de l’homme à la fin des périodes glaciaires. A cette époque, l’homme du Trièves est chasseur (il n’a donc pas tellement changé depuis…). On a retrouvé pour preuves quelques haches et pointes de flèches en silex à St Michel les Portes et sur le bord de l’Ebron.

Vers 1500 ans avant JC, un peuple Ligure arrivant par l’Italie s’installe en de petits villages et devient cultivateur utilisant des outils en Bronze.

Vers 600 ans avant JC, les Celtes barbares pillent la région en y apportant le fer. Et jusque 125 ans avant JC le Trièves est territoire Voconces, association Celtos-Ligures.

C’est le temps de la conquête romaine. Finalement les Voconces profitent de cette occupation romaine par un enrichissement culturel et une prospérité. Des routes furent construites comme de Lalley à Mens.

Puis l’empire romain s’effondre et le Trièves vit alors au rythme de ses invasions. Les wisigoths arrivent d’abord, puis les burgondes, les francs, mais aussi les lombards et les sarrasins.

Aux luttes d’ethnies, vont se succéder les luttes d’intérêts et d’influences. La féodalité et le clergé s’installent et défendent le pays contre les envahisseurs. Des places fortifiées voient le jour comme le château de Mont-Meilleur à St Baudille et Pipet.

Arrive la guerre de religion entre catholiques et protestants. Sous la conduite de Lesdiguiéres le Trièves devient un bastion du protestantisme. Son Q.G. est établi à Mens en 1572 et cet événement marque encore profondément le canton de Mens.

L’édit de Nantes ramène le calme en 1598. Il fallut reconstruire battisses et hameaux, et reconstituer les troupeaux.

Au XVII ème siècle, l’agriculture répond aux besoins de chacun. C’est la transformation de l’artisanat familial en petites entreprises qui marque ce siècle. On voit l’apparition de moulins à dégraisser la laine à Tréminis, de métiers à tisser le chanvre à Mens. L’exploitation de filons ferreux a permis l’expansion des forges, fours et martinets (moulines à fer) à Mens.

Le XVIII ième siècle voit la noblesse confortablement installée sur ses terres. Le Clergé se réconcilie avec lui-même. Les églises catholiques et temples protestants se côtoient. La bourgeoisie instruite aux écoles grenobloises prend de plus en plus de pouvoir en occupant les postes de maire, notaire et conseillé. (c’est un peu aussi le cas aujourd’hui avec l’arrivée des néo-ruraux).

L’industrie prospère, la toile de chanvre s’exporte bien. Les tresses de paille réalisées par les femmes principalement sont vendues à l’usine de Monestier de Clermont ou elles sont transformées en sacs, cabas, paniers ou chapeaux.

Par contre la métallurgie s’essouffle faute de nouveaux gisements. Seul reste viable la petite forge, qui produit divers clous et fers à cheval.

La scierie fonctionne à plein rendement produisant du bois de construction et des étais de mines pour la Mathésine.

Sous la révolution française, la noblesse disparaît comme par enchantement en laissant leurs biens aux républicains.

Au XIX ème siècle la terreur s’amenuise apportant la paix. Les communes rachètent aux seigneurs d’antan les forêts et verses des indemnités compensatoires pour les parcelles acquises. Bref les riches redeviennent un peu riche, mais moins…

L’époque est à la construction des grands axes de communications comme la route nationale 75 et le chemin de fer Grenoble–Veynes. L’importance des axes de communication est développée dans le prochain chapitre.

L’agriculture est prospère, en particulier le fourrage qui a une renommé de qualité nationale. Les hippodromes parisiens se fournissent en paille et foin du Trièves.

Vers le milieu du XIX ième siècle, l’exode rurale se ressent. La population migre vers les villes comme Grenoble ou Marseille et choisit un autre mode de vie. Seul le secteur du bois reste rentable et presque toute autre industrie disparaît.

Le XX siècle se voit bouleversé par les guerres. C’est aussi l’apparition du tourisme. Des hôtels se construisent accueillants les étrangers pour les foires ou les vacances. Il est à noter que les caractéristiques du Trièves n’ont pas incité le développement du tourisme de masse des années 70. Seul Gresse en Vercors connaît ce développement avec la construction des dolomites.

Aujourd’hui le Trièves constitue l’une des ultimes terres préservées du Dauphiné. Cette authenticité est un véritable atout en faveur d’un développement touristique dit ‘vert’ poussé par les récentes lois sur la réduction du temps de travail.

Mais revenons à notre XX siècle, le cultivateur se doit d’adopter des techniques d’exploitation moderne s’il veut subsister. C’est le temps de la mécanisation et de l’utilisation des engrais.

De l’industrie ne reste viable que les scieries. Celle de Tréminis produit jusqu’à 5000m cubes de résineux par an. Mais récemment ce secteur aussi est touché…

La production laitière est importante avec près de 15000 litres à l’exportation par an. L’agriculture actuelle est tournée vers les céréales et plus particulièrement le blé. Les transhumances venant du midi sont devenues quasiment inexistantes. Le phénomène d’alpages ne concerne plus que les bêtes du coin.

La population du Trièves aujourd’hui 


carte population

Le Trièves est composé de 29 communes regroupées en 3 cantons : Clelles, Mens, Monestier de Clermont.

La surface des 3 cantons est de 62 314 hectares pour 7 837 habitants.

Canton de Monestier de Clermont :

COMMUNES (12)

HABITANTS

SURFACE

Avignonet

189

809 hectares

Château Bernard

172

1 770 hectares

Gresse en Vercors

298

7 810 hectares

Miribel Lanchâtre

251

902 hectares

Monestier de Clermont

918

516 hectares

Roissard

193

1 371 hectares

Saint Andéol

124

2 924 hectares

Saint Guillaume

276

1298 hectares

Saint Martin de la Cluze

564

1 502 hectares

Saint Paul les Monestier

220

1349 hectares

Sinard

581

1 011 hectares

Treffort

130

1 068 hectares

TOTAL :

3 718

22 330 hectares



Canton de Clelles :

COMMUNES (8)

HABITANTS

SURFACE

Chichilianne

197

6 098 hectares

Clelles

378

1 972 hectares

Lalley

183

2 295 hectares

Le Percy

111

1 524 hectares

Monestier du Percy

166

1 445 hectares

Saint Martin de Clelles

118

1 446 hectares

Saint Maurice en Trièves

162

1 276 hectares

Saint Michel les Portes

145

1 997 hectares

TOTAL :

1 460

18 053 hectares

Canton de Mens

COMMUNES (9)

HABITANTS

SURFACE

Cordéac

205

2 661 hectares

Cornillon en Trièves

137

1 397 hectares

Lavars

113

1 530 hectares

Mens

1 241

2 886 hectares

Prébois

139

1 602 hectares

Saint Baudille et Pipet

232

3 596 hectares

Saint Jean d'Hérans

242

1 765 hectares

Saint Sébastien

178

1 994 hectares

Tréminis

172

4 500 hectares

TOTAL :

2 659

21 931 hectares

Sources : Communautés de Communes du Trièves et Ministère de l'Agriculture et de la Forêt.

L’architecture dans le Trièves


Dans le Trièves c’est une architecture rurale traditionnelle qui prédomine. En voici les caractéristiques :

Le groupement de maisons :
Les maisons sont groupées en gros villages et en hameaux aux rues assez étroites, qui ont conservé beaucoup de caractère. Il existe également quelques maisons isolées. Chaque hameau avait son four à pain et sa source.
L’implantation :
On recherche l’abri du vent et l’exposition au soleil. Les faîtages sont plutôt disposés perpendiculairement aux courbes de niveaux.
Les volumes :
Ce sont des rectangles simples assez allongés.
Les toitures :
Initialement, elles étaient à 2 pentes très fortes, 100 à 120%, couvertes en chaume de seigle.
A partir de 1880, suivant les possibilités financières des gens, est apparue la tuile écaille, à la tonalité spécifique, cuite dans la région. En même temps, la toiture a été modifiée (pour des raisons esthétiques ?) avec la création de croupes ou de demi-croupes en visière sur les deux pignons. De même ont été introduites les génoises par les compagnons bâtisseurs venus du midi.
La tuile écaille nécessite des pentes fortes.
Les murs :
Ils sont en pierres grossièrement taillées. Le crépis, de couleur gris-beige s’arrête souvent à 2.50m de hauteur. Le bois est utilisé en bardage vertical, en pignon, du côté de la porte de grange pour éclairer et ventiler (planches non jointives).
Les ouvertures :
Elles sont plus hautes que larges, disposées sans soucis de régularité. Les accès se font au sud.

Détails :
Les génoises : corniche composée de tuiles superposées.
Le  montoir : c’est une rampe qui sert à faire accéder les chars à l’intérieur de la grange. Les montoirs ont généralement été rajoutés lors des modifications de toitures et de surélévation de murs qui donnaient un volume plus important à la grange.
Les lucarnes : les grandes lucarnes du Trièves étaient utilisées pour monter le foin sous le toit quand il n’existait pas de montoir.
Les voûtes d’étable avaient des plafonds en bois qui ont été remplacés suivant les moyens financiers disponibles par des voûtes en pierre qui assuraient une meilleure protection du bétail en cas d’incendie.


Importance des axes de communication


Avant la mécanisation des transports, on cherchait souvent le chemin le plus court entre deux lieux : les ânes, mules et hommes acceptant mieux le dénivelé que nos voitures ou nos trains.

C’est comme cela qu’à l’époque Gallo-Romaine, Die était relié à Grenoble à travers le Vercors. Cette voie romaine passait par le col de Menée, la faille de la Quéry, Gresse et Vif.

Mais aujourd’hui, c’est l’étonnement qui prédomine devant la présence des carrières romaines situées dans la plaine de la Quéry en pleine nature des hauts plateaux. Ces carrières de calcaire s’expliquent par cet axe de communication mais aussi par leur inclusion de veines colorées rappelant le marbre.

On a quand même du mal à imaginer le transport de ces colonnes à Die par le col de Menée. Il semble vraisemblable que celui ci soit fait l’hiver par traîneau.

L’antique « chemin de Provence » de Aspres à Grenoble par le col de la Croix Haute et le col du Fau desservait tous les lieux. La « Route Royale » actuelle RN 75, n’en fait plus autant, ce qui fit perdre à Mens son rôle de capitale, et laissa une partie du Trièves dans l’oubli (peut-être pour son bonheur).

C’est ainsi que se développa alors Monestier de Clermont tout en longueur le long de la route nationale devenant alors un véritable « village rue ». Mais le flux automobile explosant, c’est aussi cette route qui est la cause de la décrépitude de ce village. En effet, il faut avoir fait un jour les courses à Monestier et prit l’étroit trottoir quand deux camions se croisent pour comprendre qu’il n’est plus raisonnable aujourd’hui de vivre à Monestier. Ce village aujourd’hui montré du doigt de toute la France, réclame sa déviation depuis plus de quarante ans. Mais des querelles intestines n’incitèrent pas les pouvoirs publics à dégager les crédits. Les commerçants étaient dans un premier temps contre ce projet craignant une la baisse de fréquentation de leur commerce de passage. Ensuite et surtout, ce fut une lutte entre deux projets avec des partisans de la déviation longue et d’autres pour la déviation courte. Gageons qu’en 2005, avec l’A51 au col du Fau et la déviation courte, ce village reprendra une certaine douceur de vivre…  

Moi qui suis un amoureux des chemins de fer (j’ai acheté ma maison à St Martin de la Cluze car elle est en face du petit train de la mure), je ne peux pas oublier la ligne de chemin de fer Grenoble-Veynes.

C’est en 1978 que la société PLM (Paris Lyon Marseille) achève cette traversée ferroviaire du Trièves. Longue de 110 km, elle borde le Trièves à l’est sur près de la moitié de son parcours et laisse une empreinte extrêmement forte dans le paysage. A l’époque, fleuron du Génie civil, sa construction a nécessité quatre années de travail pour réaliser les douze viaducs, les six tunnels et faire franchir à la voie le col de Lus la Croix-Haute (1165m) avec parfois des rampes à vingt-cinq pour mille. Cinq gares desservent le Trièves entre St Martin de la Cluze et St Maurice en Trièves.

Mais il est à regretter que pour des raisons économiques seul deux arrêts soient encore en fonction aujourd’hui. Un projet court dans ma mairie pour remettre en fonction l’arrêt de St Martin de la Cluze en y adjoignant une navette de bus desservant le cœur du village et les villages de Sinard et Treffort en plein extension.

J’espère vivement que ce projet aboutira !

   

L’art culinaire


Aujourd’hui l’art de la table est bien souvent une préoccupation essentielle des personnes voulant visiter une région. Sur le Trièves particulièrement, un accueil au pays passera inévitablement par le partage des saveurs locales. Sur un « produit » de randonnée à la journée, tous apprécierons de déguster un bon produit du terroir à l’occasion du pique-nique. Sur un séjour, les dîners seront la aussi l’occasion de découvrir par le palais notre patrimoine.

La cuisine du Trièves se caractérise peut-être par la simplicité de sa cuisine. Comme dans la plupart des campagnes française la base de l’alimentation sont les produits de la terre, de la ferme et de l’élevage. On mange donc très bien dans le Trièves. Spécifiquement, nous trouverons quelques produits, mais aussi l’accommodation de nombreuses vielles recettes qui font aujourd’hui la réputation du Trièves. Je vous conseille les ravioles qui sont chez nous bien différentes de celles du Royans : plus grosses, elles sont préparées à base de pommes de terre et d’oignons. On peut aussi y trouver de l’épinard ou des lentilles. Au gîte de Tréminis, si l’on prévient à l’avance, on pourra participer à cette préparation…et dégustation !

Il y a aussi les pognes, ces grosses tartes à pâte levée accommodées de courge, de pomme de terre ou de fruit traditionnellement cuites au four du village après le pain. Citons aussi les caillettes, ces petits pâtés de viande enveloppés de crépine de porc souvent cuisinées avec des épinards. Pour le fromage je vous propose un vache « le Carré du Trièves » ou un mélange brebis, chèvre et vache intitulé à raison « le Trois Pis ». Enfin pour le dessert il faudra goûter à la célèbre boufette de Mens, pâtisserie composée de deux génoises légères garnies d’une crème au sucre. Pour un pique-nique, le choix de terrines locales est important : Sur Saint-Martin de la Cluze, notre héliciculteur nous honore d’une excellente terrine d’escargot, Mme Durand ma voisine nous pigeonnera d’une très bonne terrine (de pigeon)… Mais ma préférence porte sur les terrines de faisans de mon ami Bertrand Bonnel de Mageline cuisinées au choix avec des truffes, des trompettes de mort, des girolles ou nature (c’est bien aussi).

J’espère vous avoir mis en appétit…    

Les « stars » du Trièves



Giono (1895-1970)

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Né à Manosque en 1895 et mort à Manosque en 1970, Jean Giono a vécu au cœur de la Provence.

En 1930, il rencontre la peintre Edith Berger (1900-1994) à Manosque. De cette rencontre né une profonde amitié. C’est l’origine des fréquents séjours que Giono fera dans le Trièves à Lalley entre 1931 et 1948. Plus qu’un lieu dans lequel Giono puiserait son inspiration, c’est une rencontre intime qui s’organise avec le Trièves. D’abord il trouve ici toutes les valeurs humaines auxquelles il aspire : la ruralité porteuse des vraies richesses qui, loin de venir de la possession des choses seraient issues des joies de la terre. Tantôt extraordinairement généreuse, tantôt hostile et proche de l’enfer, la vision que Giono nous livre du Trièves, de sa campagne, ses hommes, ses montagnes ou ses torrents, est à la mesure du sentiment très fort qui le liait à ce pays comme à un être.

Ces principaux romans sont Le Hussard sur le Toit (1951) et Les Ames Fortes (1950)

En 1954, il est élu à l'Académie Goncourt.

Il se consacre aussi au cinéma quelques écrits avec Marcel Pagnol.

Giono subit un premier accident cardiaque en 1962. Il est mort le 9 octobre 1970, à la suite d'une nouvelle crise cardiaque.

Gilioli (1911-1977)

atelier Gilioli

Après avoir étudié la sculpture à Nice et à Paris, il réalisa plusieurs monuments commémoratifs (le Mémorial de Voreppe, 1946) et opta pour l'abstraction, au lendemain de la guerre, surtout sous l'influence des œuvres de Laurens, Duchamp-Villon et Brancusi. Il réalisa, dans un style non figuratif qui réserve une large place au jeu des formes et à la beauté des matériaux, une œuvre raffinée et personnelle (Tête siennoise, 1960, musée des Beaux-Arts, Grenoble; l'Étoile du matin, 1951, Tate Gallery, Londres). Auteur de collages et de tapisseries, il collabora souvent avec les architectes.

Pendant la guerre, il s’installe à Saint Martin de la Cluze. Depuis cette époque, il passe régulièrement quelques mois au village où il dit « communier avec la nature ». Emile Gilioli repose au cimetière de Pâquier au pied de la charmante chapelle qui lui a inspiré plusieurs sculptures dont un bronze poli intitulé Pâquier. Sur sa discrète sépulture on peut admirer une de ses œuvres intitulée Le Couple. Quelques œuvres ornent également les bureaux de la mairie.

Tout récemment la mairie a racheté sa maison et l’a rénové. S’ouvrira fin avril 2004 à St Martin de la Cluze un petit musée Gilioli.

Gilioli

Le couple

Inscrit en lettre d’or sur le fronton de la mairie-école de Saint Martin de la Cluze :

« Quand je regarde le ciel, il est pour moi une sculpture mystérieuse éternelle »
Emile Gilioli 1911-1977


D. Que sera le Trièves de demain ?


Je veux juste ici ouvrir le débat de l’A51. Sans polémiquer, une chose est sure : cette autoroute changera l’équilibre de ce pays. Jusqu’ici à l’écart des grands axes de communication et des principaux flux touristiques, le Trièves est aujourd’hui confronté au désir de préserver son caractère et le besoin de se développer.


Beurk !

avril 2004, sur la commune d’Avignonet

Si le Trièves a longtemps souffert d’être laissée pour compte des grandes étapes du développement industriel, agricole ou urbain, aujourd’hui, elle en tirerait plutôt gloire. Mais le pays oscille toujours entre le désir de conserver son patrimoine, ses paysages et sa qualité de vivre qui fondent son identité, et la volonté de se développer. A cela, il n’existe pas de réponse ou de modèle à reproduire. La réflexion commune doit guider chaque jour ses solutions.

Depuis 1975, la démographie repart et le Trièves a vu sa population augmenter de 10% ces 10 dernières années. Cette croissance a influé sur les prix du foncier et le pays devient petit à petit « territoire dortoir » avec au nord des travailleurs grenoblois effectuant la route tous les jours et au cœur du Trièves de plus en plus de propriétaires de résidences secondaires.

Dans ce contexte l’A51 est un terrible accélérateur de ce mouvement. Aujourd’hui desservant St Martin de la Cluze, cette autoroute a fait sauter les bouchons de Vif et Claix qui étaient les gardes fous du développement de Grenoble vers le sud. En 2005 elle desservira le col du Fau et déplacera encore plus au sud l’expansion d’habitat des néo-ruraux. Et à plus long terme, elle reliera Gap ou Sisteron saignant le Trièves dans son cœur. Aujourd’hui le projet est arrêté. Espérons que les décideurs profiteront de ce moment de répit pour bien analyser les impacts et choisir la meilleure option entre le trajet par Gap coupant le Trièves, le tracé longeant la RN75 ou un simple aménagement de l’actuel RN75 (qui verrait peu être alors des tronçons payants.)

Ce projet d’autoroute offre t’il une chance d’ouverture sur la modernité, le désenclavement et le tourisme ou bien au contraire porte t’il en lui la mort de l’identité et du paysage du Trièves, atout essentiel du développement touristique de nature, sa carte maîtresse ?

Aujourd’hui je veux baser mes « produits » d’accompagnateur en Trièves sur la découverte des multiples aspects du territoire à travers les sentiers de randonnées, les parcours de découverte du patrimoine et l’accueil au pays. Dans ce contexte, l’autoroute apportera vraisemblablement plus de « clients » mais le socle même de ces produits touristiques « doux » risque fort de se dégrader…